Armée des alpes Juin 1940

28 septembre : Inauguration du panneau du chemin de mémoire de la bataille des Alpes dans les Alpes Maritimes

Inauguration / 28 septembre 2023

Nos plus sincères remerciements à toutes celles et ceux qui ont œuvré pour la réussite de ce beau projet dans les Alpes Maritimes comme les associations Edelweiss et l'Association Histoire Vivante et Archéologie Expérimentale de Christophe et Alain Fine.

Présidée par Mme la Colonelle (H) Marie-Christine FIX, représentant Monsieur Estrosi, en présence de Mme Gaelle Frontoni représentant le président du CD06 et de Monsieur Jean-Marc Giaume et du GDI (2S) Michel Klein, président d'honneur de la Fédération des Soldats de Montagne accompagné de M Jean-Pierre Martin président de l'amicale nationale du 22e BCA et de M Marc Endinger, expert Armée des Alpes.
Situé entre la stèle de Jean Moulin et la croix de Lorraine au jardin Thiole, ce panneau permet de se remémorer cette bataille si mal connue et qui fut un des premiers actes de résistance en 1940. Honneur à ces chasseurs alpins qui ont défendu notre pays dans nos montagnes alpines.
Le travail de mémoire est un enjeu important. Pour construire au mieux notre avenir, connaissons notre passé…
« Nous voici aujourd’hui parvenus au terme du cycle mémoriel entamé il y a trois ans et dédié à la bataille des Alpes de 1940. Nous inaugurons en effet l’un des tout derniers des 130 panneaux installés dans l’arc alpin, et cette remarque n’est pas tout à fait anodine. Pourquoi donc ?
Parce qu’il est bien possible que Nice ait été de fait le véritable et seul objectif stratégique atteignable pour l’état-major transalpin dans son offensive de juin 1940. Compte tenu de la brièveté prévisible des engagements, à peine quelques jours avant le cessez-le-feu, compte tenu de la proximité de notre ville avec la frontière, compte tenu de sa relative facilité d’accès, compte tenu de l’imposante communauté d’origine italienne pour laquelle on pouvait faire l’hypothèse d’un relatif soutien, compte tenu de l’écrasante supériorité numérique de l’armée du Duce. Compte tenu enfin de la charge symbolique qu’aurait représenté la conquête de la capitale azuréenne.
Autre remarque qui n’a pas souvent été formulée, et qui renvoie à l’histoire de notre comté : pour la première fois Nice, possession traditionnelle de la maison de Savoie, se voit menacée par son ancienne puissance tutélaire, alors que par le passé, la menace venait de l’ouest du Var. Du reste notre état-major avait anticipé cette menace, faisant du département l’un des plus militarisés de France.
Il n’est pas inutile de présenter ici un panorama de ce qu’était notre département en 1940.
Il comptait alors 530.000 habitants, pour l’essentiel répartis sur la bande littorale. Nice en dénombrait 242.000, Cannes 50.000, Antibes 25.000, Menton 22.000, pour ne citer que les principales agglomérations. Le haut pays subissait de plein fouet l’exode rural et la saignée démographique de la Grande Guerre. La population rurale ne dépassait pas les 16% du total. Particularité de cette population, elle comptait la plus forte proportion d’étrangers de France, 22% contre 7%. Ce qui ne laissait pas d’inquiéter les pouvoirs publics, d’autant que 74% était d’origine italienne (83.000 individus). Or c’était précisément contre la puissance italienne qu’on élevait ces immenses barrages fortifiés à nos frontières.
Ces populations transalpines provenaient pour une part de l’immigration économique de la fin du XIXe siècle, piémontaise pour l’essentiel, et d’autre part de l’immigration politique des années 20, liée à la montée du fascisme (les fuorusciti, originaires le plus souvent d’Ombrie et de Toscane). Mais les craintes fondées sur ces minorités étrangères se révélèrent vaines, car excepté le réseau consulaire italien qui animait une poignée de chemises noires, sorte de milices fascistes, la majorité de la population immigrée prendra fait et cause pour la France, comme le démontrera la participation des transalpins à la Résistance.
La ville de Nice constituait la base arrière des opérations qui allaient être livrées au plus près de la frontière. Si elle ne sera jamais directement menacée, elle restera au cœur de la bataille, car c’est là qu’on trouvait les centres névralgiques de l’armée des Alpes, ses dépôts, ses centres de ravitaillement, et l’âme de la résistance à l’envahisseur. Le quartier général (QG) du secteur fortifié des Alpes-Maritimes (SFAM) est à Saint-Pons, celui du XVe corps à Vence. Le puissant réseau de fortifications établi dans les années 30 à la frontière, la résistance efficace de nos sections d’éclaireurs-skieurs et de nos troupes d’ouvrage protégeront efficacement notre ville de toute incursion ennemie. Le 25 juin 1940, jour d’entrée en vigueur du cessez-le-feu, aucun obus, aucune bombe, n’avait atteint la ville.
Aujourd’hui est le moment d’une triple commémoration. Ce matin nous avions célébré le 178e anniversaire des combats de Sidi-Brahim, qui ont fait entrer les chasseurs dans la glorieuse légende de l’armée française, puis nous avions inauguré l’exposition consacrée au 22e BCA, le bataillon de tradition de notre ville, depuis longtemps disparu. Peut-on relier ces trois commémorations ? Peut-on trouver un fil directeur commun ?
Il n’est pas outrancier de comparer les chasseurs d’Orléans de Sidi-Brahim, les chasseurs du 22 à la tête de Béhouille en 1915 et les éclaireurs-skieurs de 1940 à la frontière alpine. Leur commune maxime fut : ne rien céder. Et ce message est éternel et justifie que nous soyons ici rassemblés. Je conclurai sur le sens de ces commémorations en citant Joseph Delteil :
« Il est bon que les lieux comme les hommes gardent la mémoire de leur berceau et, qu’à des dates choisies, nous y suspendions nos pensées. »
Jean-Pierre Martin