Chemin de Mémoire dans la Somme
Sur les traces des divisions bleues dans la Somme en 1916.
La bataille de la Somme est ainsi inscrite sur le drapeau des chasseurs, car pratiquement tous les bataillons ont été engagés durant six mois dans ces combats. Les champs de bataille de la Somme ont été arrosés du sang des soldats de montagne.
La bataille de la Somme a été plus cruelle que celle de Verdun
chemin de mémoire Somme 1916 - 2018
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Comme disait un officier : « de toutes les boues qui ont été, pour le poilu l’une des cruelles souffrances de la guerre, celle de la Somme occupe, dans ses souvenirs, la première place ; boue lourde, gluante, d’où il est difficile de sortir ».
Madame la Sous-Préfète,
Madame le maire de Rancourt, Messieurs les maires de Sailly-Saillisel, de Bouchavesnes et de Maurepas
Mon Colonel Délégué Militaire Départemental de la Somme,
Monsieur le délégué départemental du Souvenir Français,
Monsieur le conservateur du mémorial de Rancourt.
Chers anciens, chers amis.
Nous sommes rassemblés au mémorial de Rancourt pour rendre un vibrant hommage à tous nos anciens soldats de montagne qui ont participé à la fameuse bataille de la Somme. Dans la mémoire collective, Verdun demeure le lieu hautement symbolique de la Grande Guerre et pourtant se déroulant aussi en 1916, la bataille de la Somme a été plus cruelle que celle de Verdun. Pour beaucoup de personnes, la bataille de la Somme est celle des Britanniques, des Australiens, des Néo-Zélandais, … Pourtant, plus de 1 400 poilus français étaient tués dans les tranchées de la Somme tous les jours et ceci pendant cinq mois. Nos soldats de montagne de la Grande Guerre ont fortement contribué aux gains territoriaux acquis lors de ces combats dans la Somme.
En 1915, les chasseurs alpins, les alpins, les artilleurs de montagne et sapeurs de montagne avaient montré, dans les Vosges, leur combativité, leur résistance, leur courage, leur esprit d’initiative ; ils avaient acquis une solide réputation de soldats d’élite, reconnus par les grands chefs militaires français et aussi par leurs adversaires ; le surnom de Diables Bleus leur convenait bien et les faits leur ont donné raison.
En décembre 1915, le général Joffre avait convenu, lors de la conférence de Chantilly avec les représentants des Nations Alliées, de mener une grande offensive franco-britannique dans la Somme pour tenter de percer les lignes allemandes et de retrouver la guerre de mouvement. C’est ainsi que les soldats de montagne des trois divisions dites bleues ont quitté le massif des Vosges pour se préparer à cette grande offensive, que, pour la même raison, les Alpins et les chasseurs de la 77 Division ont quitté le front de Verdun. Réputés pour être des fantassins très manœuvriers, les chasseurs et alpins ont été engagés pour créer la rupture du front tant attendue depuis la guerre
Qui peut mesurer aujourd’hui de combien d’incommensurables souffrances, ces soldats ont connu dans la Somme pour vivre et combattre sous un déluge permanent d’artillerie, dans des tranchées recouvertes de boue crayeuse ! Comme disait un officier : « de toutes les boues qui ont été, pour le poilu l’une des cruelles souffrances de la guerre, celle de la Somme occupe, dans ses souvenirs, la première place ; boue lourde, gluante, d’où il est difficile de sortir ».
Que d’heures d’angoisse ces poilus ont connu avant les assauts et lors des tirs d’artillerie adverses. Quelles luttes acharnées ils ont mené pour reconquérir des parcelles du territoire national, pour affaiblir cet adversaire si coriace, pour percer ces lignes si bien défendues.
Jamais, les soldats de montagne n’ont désespéré de leur Patrie ; ils sont toujours restés fidèles à leur drapeau et à leurs fanions. Honneur et Patrie sont inscrits en lettre d’or sur la soie de leurs emblèmes, car c’était pour l’Honneur du Drapeau et la Défense de la Patrie que ces valeureux combattants se sont dévoués sans réserve.
La bataille de la Somme est ainsi inscrite sur le drapeau des chasseurs, car pratiquement tous les bataillons ont été engagés durant six mois dans ces combats. Les champs de bataille de la Somme ont été arrosés du sang des soldats de montagne. Grand fut le sacrifice de nos anciens, Grande doit être notre gratitude, Grand est notre besoin de ne pas les oublier.
Quand le drapeau des chasseurs apparaît, ce sont tous ces exploits qui sont commémorés, ce sont tous ces héros qui sont vénérés, et qui, en quelques sortes, ressuscitent. Ces combattants d’exception ont mis toutes leurs forces physiques, toute leur force morale, tout leur cœur, leur vie au service de leur Patrie.
La Fédération des Soldats de Montagne veut transmettre, aux jeunes générations, cet héritage de vertus de courage et de patriotisme que nous saluons aujourd’hui avec émotion et fierté et ceci dans la dignité. Souvenons-nous de leurs souffrances et de leurs trépas. Apprenons à nos enfants à les connaître. Dans toutes nos familles, de nos parents sont morts pour la France durant la Grande Guerre ; que les jeunes générations pensent à eux, les honorent comme nous le faisons aujourd’hui ; qu’ils soient fiers de leurs aïeux, car leur souvenir est illuminé d’un rayon de gloire.
Au pied de cette chapelle-mémorial et des huit mille cinq cent soixante-six tombes de soldats Français, nous voulons nous recueillir avec ferveur et dans l’intimité, loin du tumulte de ces commémorations grandioses, nous voulons nous rappeler la grandeur du sacrifice consenti par nos anciens et nous voulons exprimer toute notre admiration et notre reconnaissance aux soldats de montagne de la Grande Guerre d’avoir montré tant de vaillance, de bravoure et de témérité lors de ces combats dans la Somme ; en ce lieu, nous ne pouvons pas oublier les quatre-vingt-treize frères d’armes Britanniques enterrés de l’autre côté de la nationale –représentants de ces soldats du Commonwealth qui ont tant donné pour aider la France à recouvrer sa liberté- et nous voulons associer à notre recueillement les soldats Allemands, dont plus de onze mille quatre cents sont enterrés dans ce haut lieu.
Téméraires, chasseurs du 6ème Bataillon de Chasseurs Alpins, vous l’avez été, début septembre, à quelques encablures d’ici, lors de l’attaque de Bouchavesnes, au cours de laquelle vous avez réduit une résistance allemande qui bloquait la progression du 28ème Bataillon de Chasseurs Alpins. Progressant de trous d’obus en trous d’obus, chasseurs de trois compagnies vous avez encerclé les Allemands qui ont été contraints de se rendre. Le capitaine Allemand, vous voyant, s’est écrié « Ah les chasseurs, vous êtes des as ». Faisant 500 prisonniers, récupérant 9 mitrailleuses et 5 canons, le bataillon a reçu grâce à vous+- sa seconde citation à l’ordre de l’armée.
Braves et disciplinés, chasseurs du 7ème Bataillon de Chasseurs Alpins aux côtés de ceux du 22ème BCA, vous l’avez été, le 24 août, lors de l’attaque en direction du village « Le Forest », au cours de laquelle, malgré les mitrailleuses ennemies, vous n’avez eu de cesse d’avancer et d’atteindre votre but ; dans votre compagnie, vous avez perdu tous vos officiers, tous vos sous-officiers et les trois quart de votre effectif. Le caporal Coste a rassemblé les survivants et vous êtes accroché au terrain conquis, et vous avez repoussé la contre-attaque ennemie. Votre compagnie, donnée en exemple, est citée à l’ordre de la division. Lors de cette attaque, le 7ème BCA a perdu 13 officiers et 440 sous-officiers et chasseurs.
Vaillants, chasseurs du 13ème Bataillon de Chasseurs Alpins, vous l’avez été lors de l’attaque en direction de Combles, le 3 septembre, au cours de laquelle, le bataillon se heurtant à des solides résistances allemandes a quand même atteint les objectifs assignés. Faisant 350 prisonniers, infligeant de lourdes pertes à l’adversaire, récupérant 10 canons et 15 mitrailleuses, vous vous êtes illustrés et avez montré sang-froid et énergie comme le voulait votre chef de corps, mais le prix des pertes fut élevé : 500 gradés et chasseurs ont été tués ou blessés lors de cette attaque. Votre bataillon est alors cité à l’ordre de l’armée par le général Fayolle.
Intrépides et courageux, chasseurs du 27ème et du 28ème Bataillons de Chasseurs Alpins au sein de la 6ème Brigade de Chasseurs du colonel Messimy, ancien ministre de la Guerre, vous avez réussi à l’est du village de Curlu à bousculer plusieurs lignes de défense adverses, puis dans la foulée vous êtes venus relever les unités du 6ème BCA pour vous saisir du village de Bouchavesnes fortement organisé et vous avez résisté aux contre-attaques allemandes. Chasseurs du 28ème BCA, vous fîtes 400 prisonniers et vous avez récupéré 5 canons et 8 mitrailleuses. Votre bataillon fut cité à l’ordre de l’armée.
Audacieux et valeureux, alpins du 159 Régiment d’Infanterie Alpine, au sein de la célèbre 77ème Division qui avait contenu les Allemands à Arras en 1914 et dans l’Artois en 1915, vous aviez pour objectif d’atteindre, le 6 septembre, le cimetière de Barleux et la route de Barleux à Berny ; malgré de fortes résistances, vous les alpins du deuxième bataillon, vous avez réussi cette belle attaque, et avez contenu les violentes contre-attaques adverses complétées de fréquents tirs de barrage. Lors de la première journée, votre bataillon a perdu 5 officiers et 115 sous-officiers et alpins.
Ces quelques exemples ne sont pas uniques ; durant ces cinq mois de la bataille de la Somme, tous les soldats de montagne se sont dépensés sans compter, ont attaqué avec le même entrain, la même ténacité, la même confiance dans le succès.
O soldats de montagne de la Grande Guerre, c’est à vous que nous devons de vivre libres, de ne pas être sous le joug odieux d’un pays étranger ! Comme ils nous le montrent aujourd’hui, les cadres et soldats de montagne de la 27ème Brigade d’Infanterie de Montagne sont de la même trempe que leurs anciens ; présents au Mali, au Niger, au Tchad, ils combattent pour éviter que l’obscurantisme d’un adversaire djihadiste se développe dans des pays africains amis, et en Europe. Notre liberté dépend de la réussite de ces combats, la défense de nos valeurs passe par la victoire.
GDI (2S) Michel KLEIN
4 mai 2018