Armée des alpes Juin 1940
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Code lieu: 112

Le dispositif défensif du quartier de RESTEFOND

le lieutenant Taxil, chef de l’ouvrage Maginot de la Moutière, raconte la vie dans cet ouvrage en juin 1940 :« Nous étions reliés avec le monde extérieur par les corvées de ravitaillement quotidiennes longues et rudes…

Par Bertrand Hubert, Hubert Tassel, Philippe Lachal et Jehan Lande

Code lieu: 112
Accès Depuis le col de la Moutière

Le dispositif.

Au sud du dispositif ubayen, c’est le 73e bataillon alpin de forteresse (BAF) du commandant Lebeau dont le poste de commandement (PC) se trouve à Restefond qui défend cette région.
Encore plus au sud de Restefond, se trouve l’ouvrage de la Moutière ; cet ouvrage d’infanterie est composé de trois blocs qui ont été réalisés par la main d’œuvre militaire (MOM) du 73e bataillon alpin de forteresse sous la direction du 4e régiment du génie.
L’ouvrage de la Moutière se trouve sur la position de résistance ; la ligne d’avant-poste se trouve à Saint-Dalmas-de-Selvage. L’ouvrage tient le vallon de Sestrière et protège ainsi Jausiers et Bayasse de toute infiltration ennemie.
La position de résistance est renforcée par des canons de 75 mm de montagne modèle 19/28 appartenant au 93e régiment d’artillerie de montagne : ceux-ci sont en batterie à proximité du col de la Moutière pour appuyer les positions du quartier Rougna.
L'équipage de l'ouvrage de la Moutière est composé d'un officier, de deux sous-officiers et de 40 hommes issus du 73e bataillon alpin de forteresse. Il est placé sous le commandement du sous-lieutenant Maillet puis du lieutenant Taxil au moment des combats de 1940.

 

La drôle de guerre de l'ouvrage de la Moutière.

Durant la drôle de guerre, en novembre, comme les ouvrages sont évacués, le lieutenant Taxil qui commande l’ouvrage de la Moutière, se voit attribuer une fonction annexe : diriger les foyers de Jausiers où le 73e BAF prend ses quartiers d’hiver tout en commandant l’ouvrage de la Moutière. Il a d’ailleurs remplacé un sous-lieutenant qui avait été molesté par la petite garnison. Il raconte ainsi la vie dans cet ouvrage :

« Nous étions reliés avec le monde extérieur par les corvées de ravitaillement quotidiennes longues et rudes, qu’il fallait organiser chaque jour pour aller au blockhaus chercher les denrées et ramener le courrier »

Il décrit aussi son ouvrage avec ces étonnantes précisions :

« L’ouvrage (sans les déblais) serait difficilement décelable. Même la coupole d’acier, au point le plus haut, se confond, étant habillement camouflée bien sûr dans le paysage avec les rochers. L’intérieur est humide mais pas véritablement à l’excès : condensation sur les murs, quelques suintements. Mais en chauffant, on peut obtenir une atmosphère convenable. Il y a pour cela un groupe électrogène fonctionnant au mazout assez puissant pour fournir l’éclairage et maintenir les radiateurs à température raisonnable. Je ne me rappelle pas avec précision l’effectif qui se situait aux environs d’une soixantaine d’hommes au total, c’est-à-dire fantassins d’équipage ouvrage, hommes du génie (pour le groupe électrogène), avec leurs caporaux et sous-officiers, l’adjudant médecin et le commandant d’ouvrage. »

Et quand les Italiens attaquent en juin, son secteur est resté calme. Il raconte :

Ces huit jours de juin furent caractérisés par le mauvais temps à peu près continuel : pluie, brouillard, un peu de neige chaque jour, avec le ciel constamment couvert.

« C’est ce qui nous valut sans doute de ne pas être bombardés ; pas du tout bombardés. Nous étions sur le qui-vive comme dans la célèbre nuit, moins tendus sans aucun doute, car les nuages, que les hommes bénissaient nous protégeaient. L’ouvrage n’a même pas vécu sur lui-même en utilisant les stocks de vivre car les corvées de ravitaillement eurent lieu comme « avant ».

Nous vécûmes davantage à l’intérieur.

Aucune sortie qui ne fût justifiée.

Nous apprîmes que les Italiens avaient franchi le col de Pourriac, face au camp des Fourches.

Mais entre le col et le camp s’étend un vaste vallon (Le Salso Moreno) sans aucun arbre. Nos ennemis s’y engagèrent, paraît-il, nombreux et comme pour une marche d’exercice, l’arme à la main… je ne sais pas si l’ouvrage de Restefond entra en action, mais ces pauvres « Alpini » n’allèrent pas loin, au-delà du col. Ils offraient une trop belle cible, à vue, pour nos unités des Fourches ou des intervalles et furent descendus comme des lapins avons-nous entendu dire.

Quelques obus italiens tombèrent non loin du petit ouvrage du Pra, aux avant-postes de notre secteur, au fond de la vallée de la Tinée, un peu au-dessous du camp des Fourches. Ils ne firent pas de mal. »

Aucune perte en définitive pour le 73e BAF !