Armée des alpes Juin 1940
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Code lieu: 098

Le fort du Janus

La position dominatrice du fort du Janus au sommet d’une crête, lui donne la possibilité de veiller sur Montgenèvre au nord et sur les sources de la Durance au sud.

Par GDI(2S) Hervé Bizeul, Patrick Lemaitre, Nicolas Izquierdo

Code lieu: 98
Accès à pied 30' de Montgenèvre

« Sous ses vieux murs, on creuse de nouvelles galeries  qui relient dix blocs. Les vieux souterrains sont intégrés partiellement au nouveau projet. Ceux qui n'ont plus d'utilité sont remplis par les rocailles générées par le terrassement. Pendant l'été 1939, après une interruption des travaux, les dernières interventions furent réalisées, telles que les énormes coches de béton coulées."

Sylvie Bigoni dans son ouvrage « Montgenèvre de l’Infernet au Janus »

Le Fort du Janus 

Le nom du fort prend son origine dans la mythologie romaine où le dieu Janus est le dieu à double face.

L’évolution du fort suit les progrès de l’artillerie de la fin du XIX° siècle à 1940.
Les premières constructions d'importance datent de 1883 lorsqu’une route fut construite depuis le Gondran A et qu’une première position de batterie fut réalisée pour 6 pièces d’artillerie orientées au nord vers le col de l’Alpet au pied du Chaberton.

Le fort ne cessera de se perfectionner au gré des progrès de l’artillerie, de la balistique et des munitions.
La crise de l’obus « torpille » en 1886 rendra obsolète les premières constructions Séré de Rivières de 1886 et motivera la réalisation d’une batterie en caverne sous casemates  à l’abri des bombardements en mai 1889 et à partir de 1931 celle des 8 ouvrages bétonnés de type Maginot.

Fort du Janus

Site Montgenèvre

Le Janus au cours des combats 

Le Janus est l'un des rares ouvrages du secteur à connaître l'épreuve du feu en juin 1940 en étant pris pour cible par les 149 mm du fort italien du Chaberton qui le domine de près de 600 m.
Une cloche GFM porte encore la marque du ricochet d'un obus italien.

Le 17 juin 1940, le fort du Chaberton tire pour la première fois; les observateurs du Janus entendent nettement le tir par salves. Le 18 juin 1940 dans la matinée, l'artillerie italienne vise le Janus et le Chenaillet, mais c’est surtout à partir du 20 juin que le Janus participera activement à la bataille de Montgenèvre.
Le Chaberton ouvre en effet le feu sur le Janus à partir de 8h00. Celui-ci reçoit 300 obus !
L’ouvrage enterré ne subit aucun dégât mais les  superstructures de l’époque Séré de Rivières sont ravagées.

Le 20 juin, le Janus guide les tirs des mortier de 220 mm du 154eRAP de la batterie des quatre chemins et du clôt de l’Infernet sur la route de Clavière (cf Max Schiavon, Victoire sur les Alpes page 208).

Miguet compte sur deux observatoires.
En premier lieu, le Janus qui disposant d’instruments d’optique puissants sous cloche blindée et placé au plus près et le plus en altitude possible face au Chaberton, doit permettre d’obtenir des relevés précis.
En second lieu, l’observatoire situé à proximité du fort de l’Olive, qui doit permettre de voir certains coups longs qui ne manqueront pas de tomber derrière le fort du Chaberton.
L'observation est encore complétée par l'observatoire de la Croix de Toulouse.
Ces trois observatoires permettent de faire une triangulation très précise.
A 09h00, le fort des Têtes reçoit en provenance du Chaberton une première rafale d’une trentaine de coups.
Le LTN Miguet donne alors l’ordre de tir à son lieutenant aux pièces (LTN Fouletier) qui effectue les premiers tirs.
Le premier obus est court comme l’avait calculé le LTN Miguet.
Le deuxième et le troisième obus se rapprochent doucement du fort.
Le huitième tombe sur le fort. Miguet ordonne alors au LTN Fouletier de conserver les éléments et de poursuivre le tir. Malheureusement la brume s’installe et le tir ne pourra reprendre que vers 15h00.

Pendant ce temps, le Janus subit les tirs massifs du Chaberton.
En fin de mâtinée pour faire face à l’offensive italienne, le commandement français décide d’utiliser la section de 280 mm de l’Eyrette (sous l’Infernet) pour tirer sur la route de Clavière en complément des mortiers de 220mm.
C'est l'observatoire du bloc 4 du Janus qui règle directement ces tirs.
Vers 15h00, le LTN Miguet profite d’une éclaircie pour reprendre les tirs avec l’ensemble de ses 4 pièces de 280mm.
Le Chaberton riposte de toutes ses pièces vers le fort des Têtes d’où il pense que les tirs français proviennent.
Ces tirs sont complétés par une attaque aérienne sur le fort et sur le Mélezin (trois blessés et un mort à la batterie de Serre paix sont à déplorer).
A 16h00, le chef de section des canons de 25 du PA de la vachette est blessé et un de ses servants est tué à La Pinée (voir panneau de la Vachette).
Pendant ce ,les tirs de réglage des 280mm s’est achevé et les obus sont « dessus » comme l’annonce Miguet au téléphone. Dès lors c’est le tir d’efficacité sur le Chaberton.
A 17h30, un obus de 280 s’abat sur la 6e tourelle du Chaberton qui vole en éclats et dont les munitions explosent.
Puis c’est le tour de la 3° tourelle d'être touchée et d'être projetée en contrebas.
Vers 18h00, un obus tombé au milieu du fort provoque un immense panache de fumée.
A 19h00, un nouveau coup au but est observé sur la 1ère tourelle puis dix minutes plus un impact est relevé entre la 5e et la 6e tourelle déjà touchées.
Malgré le chaos généré par les tirs français, , le Chaberton a pu tirer depuis 16h00, 600 obus sur le Janus.
Mais le feu cesse à partir de 19h00. Seules deux tourelles restent opérationnelles.
Le fort du Chaberton est neutralisé, même si ces deux tourelles continueront de tirer jusqu'au 24.
Les pertes matérielles sont lourdes, le fort a perdu l'essentiel de son potentiel de combat et l'observatoire est inopérant. Le bilan humain est de 8 morts et 53 blessés.

Le 23 juin, les Italiens reprennent leur attaque vers le Rocher de dix heures.
A la demande urgente du PA qui est menacé de submersion, le Janus tire 216 coups avec ses mortiers de 75 mm du bloc 3 qui venaient juste d'être réglés. Malgré le manque de visibilité, l'attaque italienne est brisée net.
Le même jour, le Janus reçoit l'ordre de repousser les Italiens qui viennent de s’emparer du Chenaillet.
Utilisant ses 4 pièces de 95 ,le bloc 8, accompagné de toute l'artillerie française, occasionne des pertes conséquentes aux fanti du 30° Regimento di Fantaria qui vient de s’emparer du PA.
Le 24 juin, la division Sforzesca est relevée par une division fraîche qui relance immédiatement l'action vers Montgenèvre.
Le Janus reprend ses observations au profit de l'artillerie française qui se déchaîne et qui arrête encore une fois les assauts italiens.
Frustrés de l'armistice qui est annoncée, les artilleurs de montagne tirent toutes les munitions qui
leur reste.

Max Schiavon conclut cet épisode en écrivant :
« Le succès français face aux italiens est dû à la préparation de longue date du dispositif, aux actions des SES toujours mordantes à la réactivité du commandement depuis le général Cyvoct jusqu’aux échelons locaux mais aussi et surtout à la masse de l’artillerie concentrée dans la zone. Cette artillerie du Briançonnais a tiré 16055 obus, ce qui représente 462 tonnes de munitions . Si l’on songe que beaucoup de ces projectiles sont tombés juste, on comprend les pertes italiennes lors de la bataille de Montgenèvre Cervières (140 morts, 553 blessés, 23 prisonniers) ».

On ne déplorera que 10 morts 16 blessés et 19 prisonniers coté français malgré l’ampleur des moyens déployés par l’armée italienne : deux divisions d’infanterie attaquant de front et un emploi également massif de l’artillerie : 8400 obus ont par exemple été tirés sur les pentes nord du Janus pour appuyer les attaques du Rocher de dix heures du bois de Suffin et du bois de Sestrières.

Un des 4 canons du Janus

Cliché Vaubourg Cédric

Description détaillée du fort

ARMEMENT, Observation
Référence site https://wikimaginot.eu/

L'ouvrage dispose de 3 observatoires à l'avant de l'ouvrage :

– le bloc 4 sommital, avec une cloche VDP et une cloche GFM conjuguée

– les blocs 5 et 6 situés en dessous du bloc 4 dans la falaise de part et d'autre de l'arête. Ces

blocs sont équipés d'un créneau FM modifié pour l'observation et étaient initialement

considérés dans les projets comme des annexes tactiques du bloc 4.

– un créneau d'observation du même type dans le bloc 2. Ce créneau aurait dû disparaitre au

profit d'une lunette d'observation du champ de tir de casemate, finalement non installée car

ce développement ne débouchera pas.

En complément, le bloc 2 comporte initialement un créneau de communication optique dans

l'orillon, constitué aussi d'un créneau FM modifié.

Source(s) :
SHD 2V244, 2V259

ARMEMENT, Spécificités

En juin 1940 en peine bataille, il sera procédé à l'agrandissement des embrasures de 75mm qui seront rognées du coté haut de manière à augmenter l'angle de tir pour soutenir la défense du nord du Col de Montgenèvre.

CONSTRUCTION, Description

L'ouvrage du Janus est un ouvrage d'artillerie CORF (Commission d'Organisation des Régions Fortifiées) comportant sept blocs et une entrée. Deux blocs cheminée permettent l'évacuation des gaz de l'usine et de l'air vicié. L'ouvrage Maginot a été construit sur le site de l'ouvrage Séré de Rivière du fort du Janus. Il en conservera le bloc 8 réalisé en 1906 lors de la modernisation.

Bloc 1, entrée mixte :
Extérieur :
– 1 créneau pour jumelage de mitrailleuses Reibel MAC 31. Une arme mixte (JM/AC25) était prévue mais n'a pas été installée. Les réservations pour l'installation du bi-rail dans la maçonnerie sont réalisées.
– 1 cloche GFM type A (Fusil mitrailleur et mortier de 50)
– 1 créneau FM 24-29
– 1 goulotte lance-grenade
– 1 canon de 75 (tube de rechange des mortiers du bloc 3) arrimé sur chariot Decauville.
Embrasure pratiquée dans le tablier du pont-levis

Intérieur :
– 3 créneaux FM 24-29 de défense intérieure
– 3 créneaux de porte blindée avec support FM
– 1 goulotte lance-grenades

Le bloc 2 : Flanquement de la route de Montgenèvre (Nord)
– 2 créneaux de mortiers de 81 mm
– 2 créneaux pour jumelage de mitrailleuses Reibel MAC 31
– 2 créneaux pour fusil mitrailleur 24-29
– Une sortie de secours

Le bloc 3 : casemate d'artillerie Flanquant vers la vallée de la Clarée (Nord)
– 2 mortiers de 75 mle 31
– 1 goulotte lance-grenades
– 1 sortie de secours

Photo Jean-Louis Renaud. Amicale du Régiment de la neige.Le bloc 4 : Observatoire

– 1 cloche GFM(Guetteur Fusil mitrailleur) type A et mortier de 50
– 1 cloche observatoire VDP

Ci contre cloche GFM

Photo Jean-Louis Renaud. Amicale du Régiment de la neige.

Bloc 5 : Observatoire vers le nord
– Créneau observatoire

Bloc 6 : Casemate d'infanterie et observatoire vers le sud
– 1 créneau pour jumelage de mitrailleuses Reibel MAC 31
– 1 créneau d'observation vers le Sud-est
– 2 goulottes lance-grenades

Bloc 7 : Flanquement de la route de Montgenèvre
– 1 créneau pour jumelage de mitrailleuses Reibel MAC 31

Bloc 8 : casemate de l'ancien fort flanquant vers le Gondran (Sud)
– 4 canons de 95 de marine
– 1 créneau observatoire

Bloc 9 et 10 : Cheminées de ventilation

 

 

Fort du Janus

Fortiffisère

Notes et références

Sylvie Bigoni : Montgenèvre de l’Infernet au Janus

Max SCHIAVON, Victoire sur les Alpes

Site internet https://wikimaginot.eu/

Site internet les Historateurs https://www.youtube.com/watch?v=irdXkm2Klzo

Henri Béraud Bataille des Alpes Album mémorial juin 1940 1944-45

Voir la vidéo des Historateurs:
« L’Ouvrage du Janus : L’étonnante forteresse invaincue des Hautes-Alpes »: https://www.youtube.com/watch?v=irdXkm2Klzo

https://wikimaginot.eu/V70_construction_detail.php?id=11024

https://www.visorando.com/randonnee-le-fort-janus/

https://www.altituderando.com/Sommet-de-Chateau-Jouan-2565m-et-le-Fort-du-Janus

video :

https://www.youtube.com/watch?v=irdXkm2Klzo

https://www.youtube.com/watch?v=YT8Ub1ISPl4

https://www.dailymotion.com/video/x28z0lk

https://m.facebook.com/historateurs/videos/1288147841597374/

https://ms-my.facebook.com/EsfMontgenevre/videos/fort-du-janus-montgen%C3%A8vre-autrement/478653500163405/

 

 

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