Les combats au col du Carro
Pendant 45 minutes, les éclaireurs skieurs résistent mais, sous le nombre, la pression devient trop forte.
Les combats au col du Carro 21 juin 1940
Pendant 45 minutes, les éclaireurs skieurs résistent mais, sous le nombre, la pression devient trop forte.
La Section d’ Eclaireurs Skieurs (S.E.S.) du I/97e Régiment d’Infanterie Alpine (R.I.A.) commandée par le sous-lieutenant Rivoire est chargée de défendre le secteur de Bonneval-sur-Arc.
Deux groupes tiennent la route du col de l’Iseran au pont des Neiges qui est miné et prêt à sauter.
Un autre groupe de dix hommes, dirigé par le sergent Herman, stationne au col frontalier du Carro.
Le 21 juin, en fin de matinée, des tirs de mortiers italiens s’abattent à proximité des positions françaises du Carro. Plusieurs dizaines d’Italiens progressent sous le couvert de mitrailleuses. Dès qu'ils arrivent à portée de tir, les éclaireurs ouvrent le feu.
Pendant 45 minutes, ils résistent mais, sous le nombre, la pression devient trop forte.
Pour ne pas être submergés, ils décrochent progressivement, utilisant chaque rocher ou repli de terrain pour tirer. Rapidement, six transalpins gisent sur le sol, hors de combat, blessés ou tués.
Le sergent Herman et les éclaireurs Laville et Collanet, avec un fusil-mitrailleur protègent le repli du groupe.
Les trois hommes, menacés d’encerclement, décrochent à leur tour.
Les Italiens progressent et occupent le refuge du Carro. Les éclaireurs s’établissent dans les chalets de Léchans.
Des tirs de mortiers ennemis les contraignent de les évacuer.
Ils montent à l’Ouille-Noire où ils arrivent complètement fourbus en fin d’après-midi.
Trois hommes ont été légèrement blessés par des balles ou des éclats.
Le 25 juin, une patrouille envoyée aux Pigettes rend compte qu’elle n’a rencontré aucun Italien dans le secteur. Un groupe de la S.E.S. descend occuper Bonneval-sur-Arc.
Des Italiens se dirigent sur Bonneval sur Arc. Ils sont arrêtés au pont du Villaron par le sous-lieutenant Pichon du 70e Bataillon Alpin de Forteresse (B.A.F.). Il leur indique, que conformément aux clauses de l’armistice, ils n’ont pas le droit de dépasser la ligne atteinte le 25 juin à 0 h 35.
Grace à cette résistance, Bonneval-Sur-Arc et toute la vallée en amont du Villaron restera en zone libre et ne sera pas intégrée à la zone d’occupation italienne.
97e RIA
Coll. Laurent Demouzon
Historique du 97e régiment d’infanterie alpine en 1940
Face à la frontière italienne la 6e Armée compte à la mobilisation générale de 1939 plus de 550 000 hommes au sein de onze divisions et de quatre secteurs défensifs dont trois fortifiés.
Du fait de l’attitude de non-belligérance de l’Italie en 1939 et du fort enneigement du massif alpin, le commandement en chef décide d’alléger le dispositif face à l’Italie. Les quatre divisions alpines d’active, dont la 28e division d’infanterie sont dirigées sur le front de l’Est de la France. La 6e Armée est devenue l’Armée des Alpes aux effectifs réduits à 175 000 hommes.
Tous les bataillons de chasseurs alpins et les régiments d’infanterie alpine ont laissé sur les sommets alpins leurs unités d’élite : les sections d’éclaireurs-skieurs (SES). Ainsi à Bonneval-sur-Arc, la SES du premier bataillon du
97e régiment d’infanterie alpine défend la frontière italienne. Les Alpins de leur régiment se couvrant de gloire sur le Chemin des Dames.
Dissous en 1924, le « Neuf-Sept » est reformé à Chambéry en 1939, car « la grande guerre » n'était pas la « der des ders ». Il est composé d'éléments actifs et de réserve. Il se fixe d'abord en Tarentaise pour y garder la vallée, puis, dès le
15 octobre il part en Alsace, s'installe dans la région de Reichshoffen, et au début de novembre il prend position en avant de la ligne Maginot à l'est de Bitche dans le secteur d'Éguelshardt, Sturzelbronn, Philippsbourg. L'hiver est rude.
Les « Chamois », tel est le nom que se sont donné les anciens, sont aux avant-postes au Kamelsberg, à l'Erleumuss, au Plateau de l'Exil, par — 30°. L'ennemi se promène dans la zone boisée et coupée qui s'étend entre la ligne Maginot et la frontière. Le Commandement crée alors des points d'appui d'où l'on envoie des patrouilles ; il organise des corps francs, un par bataillon, qui font des incursions en territoire ennemi ; mais le sol est truffé de mines et les Alpins eurent beaucoup à en souffrir. Aimés des Alsaciens dont ils visitaient les villages : Offwiller, Rothbach, Schillersdorf,
les Chamois quittent leur secteur le 15 avril et vont au repos dans le Jura.
Au début de mai l'offensive allemande se déclenche ; alors, le 97ese dirige vers Soissons sous un bombardement intense et le 18 il prend position sur le canal de l'Ailette entre Chavignon et Pargny-Filain. L'ennemi attaque sur l'Ailette,
dès le 20. Le commandement français en fait sauter les ponts. Les forces allemandes exercent alors une pression qui leur permettra de prendre à revers toute la défense. Le régiment, commandé par le Lieutenant-Colonel Jacquin qui s'est installé à la Ferme de la Malmaison, contre-attaque et rejette vers la rive nord des éléments qui ont franchi le Pont Oger. Pendant quinze jours, sans rien céder, il lutte contre des troupes supérieures en nombre, qui renouvellent leurs attaques ; elles sont facilitées par des avions de reconnaissance qui survolent nos lignes, et que nos aviateurs ne gênent guère.
Le 5 juin, la poussée allemande est violente. Le bombardement est précis et puissant : bombes des Messerschmitt, obus de tout calibre. Le combat dure toute la journée : les bombardements et les assauts se répètent, mais les Alpins, attachés au sol, tiennent toujours.
Le 6 juin, le 97eoccupe toujours le Chemin des Dames ; il se bat à un contre trois, ses pertes sont élevées.
Le soir, il résiste encore ; mais pour échapper à un débordement de notre gauche, l'ordre est donné, après minuit, à la Division de se replier derrière l'Aisne.
Avec les cinq cents hommes qui lui restent, il traverse les villages en ruines d'Aizy et Jouy, passe l'Aisne à Condé et continue la lutte, à un contre dix.
Le 8 juin il se replie derrière la Vesle, se bat sur la coupure de cette rivière. Le Commandant Fodéré y est gravement blessé. Les pertes sont sévères.
Les 9 et 10 juin, combats dans la région de Fère-en-Tardenois ; ce sont de dures journées pour les Alpins épuisés et réduits à une poignée d'hommes.
Le 11 juin, ce qui reste du régiment passe la Marne à Dormans et le regroupement se fait au village du Baizil.
Il n'y a plus que quatre cents hommes et dix officiers.
Alors commence la retraite sous les bombardements de l'aviation ennemie qui semble s'acharner sur les nôtres.
Les Alpins qui ont eu la volonté de vaincre ne se battent plus que pour l'honneur. Maintenant, c'est la retraite : elle se fait sous les bombardements qui sont particulièrement violents aux abords des ponts. Ce qui reste du 97efait toujours front, quoique épuisé de fatigue. Guérilla des têtes de ponts, des bouchons. Il se retire sur Allemand, Saint-Loup, Villeneuve-Saint-Vistre, sur l'Aube, où les ponts ont déjà sauté. Plusieurs éléments sont faits prisonniers.
Les autres franchissent la rivière à la nage ou par des moyens de fortune.
A partir du 13 juin, le repli se fait par petits groupes. Quelques coups de main encore, de-ci, de-là.
A l'armistice quelques hommes et le P.C. du régiment arrivent à Bénévent-l'Abbaye (Creuse).
Les Chamois de 39-40 ont montré les mêmes qualités de bravoure et d'abnégation que leurs aînés, mais la guerre qu'ils ont faite ne ressemblait à aucune autre et la fortune des armes leur a été contraire. Ils appartenaient à une division d'élite, la 28e, commandée par le Général Lestien et citée à l'ordre de l'armée pour son esprit de sacrifice poussé jusqu'à la dernière limite.
Eux-mêmes ont été cités élogieusement à l'ordre de leur Division : «Régiment de formation qui, sous les ordres du Lieutenant-Colonel Jacquin, a eu au feu la plus belle attitude. En particulier au cours de labataille du 5 au 7 juin a vaillamment défendu ses positions et subi sur place les plus lourdes pertes, certains éléments du 3ebataillon, aux ordres du Commandant Fodéré, arrivant même, après avoir reçu l'ordre de repli, à se frayer un chemin à travers les lignes ennemies, après avoir été complètement encerclés. »
Telle est votre histoire, Chers Camarades du 97e. Elle est faite de vos efforts, de vos fatigues, de vos souffrances.
Vous pouvez la raconter à vos enfants et petits-enfants. Ils ne rougiront pas de vous.
Historique du 97e Régiment d'Infanterie Alpine publié à l'occasion du congrès du 17 mai 1953 à Chambéry. Périodes 1914-1918 et 1939-140. Numérisation le 16 juillet 2015
Sincères remerciements à la municipalité de Bonneval-sur-Arc